In Vogue Spirit

In Vogue Spirit

Wet Hair

 

Note 8/10
Label : De Stijl
Année : 2011

Wet Hair, trio américain composé de Ryan Garbes, Shawn Reed (tous deux ex-membres de Raccoo-oo-oon) et Matt Fenner, ne pédale pas dans la choucroute. Jeu de mot facile certes, mais évident puisque la musique du groupe penche invariablement vers le krautrock, ce monstre polymorphe à quatre temps. Polymorphe, puisque ce terme générique, selon la bible Krautrocksampler de Julian Cope, tirerait son origine de la presse anglo-saxonne qui donna ce sobriquet au mouvement ouest-allemand alliant rock progressif, sonorités électroniques et directions expérimentales – on résume grossièrement. Wet Hair joue donc en quatre temps et flotte avec nostalgie vers le krautrock ou ses parents proches.

In Vogue Spirit  est le dernier album en date du groupe paru en mai sur De Stijl Records et Wet Hair se situe ici un cran au dessus de ses disques précédents, traîne moins en longueur, élague ses morceaux et pose de nouvelles fondations davantage orientées vers la pop. « Echo Lady », d’emblée, jette les bases de cette nouvelle orientation : la basse est profonde et le rythme est lancé. Les claviers annoncent fièrement la tournure que vont prendre les quarante prochaines minutes. « The Garden Room », sur sa ligne de batterie pré-enregistrée de synthétiseur vintage, déroule sa pop désarticulée sur un chant fantomatique : Ian Curtis est ici poltergeist. « Liquid Jesus », avec sa longue introduction aux accents d’orgue funéraire, bascule soudainement vers un rock lancinant porté par la batterie lourde, où le chant narquois et un brin désabusé de Shawn Reed ajoute une langueur presque nocturne. « Tarantula », enfin, tisse sa toile sucrée/salée sur un Moog sautillant. Les huit morceaux assimilent des sons marqués par leur époque et les régurgitent en un album incroyablement frais sans devenir frigide, et encore moins rigide.

Ce que l’on entend ici, c’est un disque aux réminiscences certaines. Mais cette nostalgie ne doit pas être considérée comme passéiste, comme du vol à l’étalage. Il y a de l’affection dans ces morceaux. Une ligne est tracée entre les références (ici du Suicide, là du Faust, un peu plus loin du Kraftwerk) mais elle est justifiée par la vigueur des mélodies et l’habileté à remodeler un passé composé en un présent simple.

Chronique parue sur Goûte Mes Disques