Lower Dens
Note : 9/10
Label : Ribbon Music
Année : 2012
Il existe l’effondrement, le krach musical : c’est ce que l’on nomme le syndrome du deuxième album ou, en anglais, le « sophomore slump ». C’est une constante dans cette industrie musicale : les groupes sont attendus au tournant lors de la parution de leur album sophomore. Certains même en jouent : le titre du second album de Grandaddy, The Sophtware Slump, fait référence à ce syndrome. La liste des albums ayant héroïquement passé cette épreuve est évidemment trop longue, et certains disques, trop en avance ou trop décalés, ont dû se soumettre à la patine du temps avant de triompher.
Concernant le second album de Lower Dens, le bien-nommé Nootropics (les nootropiques étant des drogues qui changent la pensée, au mode opératoire encore incompris), la référence au syndrome du second album est à prendre à la légère : impossible de dire s’il sera référence en la matière, et là n’est pas la question. L’histoire, potentiellement, nous le dira. L’incroyable fertilisation des friches musicales du groupe, entamées sur Twin-Hand Movement en 2010, frappe avant tout. Le groupe a connu pas mal de changements de line-up (un nouveau guitariste, un nouveau batteur) en 2 ans, et cela se ressent évidemment sur le nouvel album. Nate Nelson, le nouveau batteur, apporte une touche indéfinissable à la musique du groupe, en empruntant des directions nouvelles et mécaniques issues du Krautrock, et en jouant de la batterie électronique sur certains morceaux (« Lamb », « Nova Anthem », « Lion in Winter Pt. 2 »), leurs donnant de fières allures imprégnées des percussions utilisées par Yo La Tengo ou Arab Strap sur certains de leurs morceaux. Et puis l’écriture s’est affinée, la matière s’est durcie – le duo « Brains » / « Stem » en est l’exemple parfait. Sur une rythmique implacable et métronomique, Lower Dens dévoile un hymne dont les paroles sont aux antipodes de cette recherche sonore millimétrée (« And no lines allow for mapping / Cause I close my eyes / and feel the teeth of the machine »).
Du doux « Lamb » au final radieux en passant par les longues circonvolutions de « In the End is the Beginning », Nootropics est un album au minimalisme omniprésent, tirant sa profondeur des subtilités des arrangements et des colorations employées, sans jamais perdre du terrain. C’est à se demander à quoi ressembleront les prochains disques de Lower Dens, à en juger par l’impeccable évolution effectuée en à peine deux ans.
Chronique parue sur Goûte Mes Disques